26 septembre 2015

Salom* Ouzbékistan (= *bonjour pour les ignares du chapitre précédent)


 

Dimanche 20 : frontière ouzbèque. « Aïe ! » disent les gens qui sont déjà passés par là.

Nous quittons le Kirghizstan : 198 500 km2 / 5,6 millions d’habitants, avec au moins autant de chevaux et de moutons vivant dans des paysages sauvages de montagnes, de jailoo à perte de vue.
Pays au régime politique plutôt démocratique.

Direction :  l’Ouzbékistan :  447 400 km2 / 30 millions hts - pays au patrimoine artistique fabuleux.
Comme au Tadjikistan, le Président en exercice depuis l'indépendance des pays de l'ex URSS,  est souffrant, que deviendra le pays en cas de changement de gouvernement ?


une des nombreuses affiches partout à la ville comme à la campagne qui chante le pays et ses progrès


Les deux postes-frontières donnent un contraste saisissant.
Le poste kirghize est bricolé, un petit bâtiment très fatigué, une barrière rouillée qui se lève difficilement sur un chemin cahoteux. En attendant la fin du contrôle, un douanier propose à Denise une petite place au soleil à côté de lui sur un vieux banc recouvert d’un coussin multicolore.

Côté ouzbèque, la république nous accueille avec un portail monumental, un soldat armé de pied en cap, poste tout bétonné, des fosses pour examiner sous les véhicules, mais  l’accueil est tout aussi gentil qu’à côté.

2 h montre en main, 0 taxe, 0 fouille ! Nous allons faire des envieux.

Maintenant le paysage est toujours immense mais c’est une plaine. Cultivée. Avec du coton partout. Avec des camions qui font des aller et retour entre les champs où travaillent les femmes et l’usine proche où on entasse des montagnes de coton.


Dans ce pays, comme dans ses voisins  il y a un partage équitable du travail : les hommes s’occupent des animaux, de leur voiture, les femmes gèrent les enfants, le travail des champs, la maison.



Les villages prospères se succèdent : pas une trace de route qui mènerait vers l’inoccupé.





Nous échouons sur un carré 4X4 au bord d’un champ : ah ! La campagne. Son calme !

Oui mais c’est la fête au village ; tous les jeunes et moins jeunes du coin (0 jeune fille ou femme) passent par notre Defender, nous saluent avec les quelques mots anglais qu’ils connaissent et deviennent de plus en plus collants au fur et à mesure que le taux de vodka augmente dans le sang.
Nous tirons les double-rideaux de notre séjour/cuisine/coin-repas pour dissuader un peu.

Puis le calme enfin…pas tout à fait : quelques petits bruits nous informent qu’il y a toujours des gens qui traînent autour de Defender. Puis des coups frappés, on ouvre, lassés : « passeport ! »
Un type sans uniforme nous demande nos papiers que nous refusons bien sûr de donner, il insiste en restant poli mais ferme, et nous découvrons dans la nuit 4 voitures dont une voiture de police, 3 policiers et des gens du village assemblés sur notre bord de champ. On nous propose gentiment pour notre sécurité bien sûr d’aller dans un hôtel à cause des « terroristes », d’ailleurs, on va nous y accompagner.
...Et nous voilà à 23h précédés et suivis des voitures (dont gyrophare) à travers les villages animés : coiffeur, M.Bricolage, épiceries et bien sûr tous les petits restaurants très actifs encore - pas de législation sur le travail. Plus loin, nous nous mettons d’accord : pas question qu’on nous « mette en assignation » dans un hôtel : aucun règlement ne l’autorise. On s’arrête, notre interlocuteur également, on parlemente à nouveau. Bon enfant, (!) il nous propose un bon plov au restaurant à côté… ! on promet qu’on va dormir à la ville et ils finissent par nous lâcher.
Où trouver un endroit pour dormir dans cette campagne fermée ? La ville la plus proche ?  Aucun hôtel, on continue vers la ville suivante Namangan et on finit très brusquement dans un cul de sac : la route est barrée par un éboulis.
Ca sera notre chance, on s’installe à côté ( en sécurité ).
Non, ce n’est pas terminé, juste en-dessous, on fait  la fête dans un immeuble; on s’endormira enfin, bercés par les coups de frein et dérapages des autres automobilistes surpris comme nous.

Lundi 21 : lever laborieux; une voix amicale nous interpelle : un jeune grand-père coiffé de son petit-fils nous invite chez lui. Sympa ! On lui demande quelques instants pour nous préparer mais il doit craindre qu’on s’échappe : pas question de traîner, il nous conduit vers sa maison à 100m.
C’est en pyjama que nous avons visité  sa maison, son jardin, le puits qu’il construit dans la cour puis petit déj: un plov avec son fils qui parle un peu anglais.

Vive la chaleur des Ouzbèques !

Suite de la route vers Angren un peu ralentie par un arrêt à un  poste de contrôle : 2h d’attente.
Au loin nous avons pensé à un péage de l’autoroute A6 le 31 juillet : embouteillage et  larges portiques, de près il y a en plus des casemates, des soldats tout équipés + cagoule noire.

C' était un peu différent des postes de contrôle tadjik, sur les petites routes de campagne, dans une cabane ouverte où le militaire recopiait consciencieusement nos informations en lettres latines (qu’il ignore) sur un cahier d'écolier avec des colonnes tracées au stylo.

Scoop : en Ouzbékistan  les montagnes peuvent flotter, puis plonger pour mieux réapparaître, flottant à nouveau ou se dressant vigoureusement.

Ce pays va nous surprendre.

Mardi 22 : en 400 km nous avons eu une dizaine de check-points.
C’est sans doute inversement proportionnel au nombre de station-essence ouvertes.
pénurie de carburant, on nous avait prévenu, mais à ce point...
Voyant deux longues files d’attente qui ralentissent notre voie "rapide", nous pensons « check-point », pas du tout : c’est l’attente à l'une des rares stations ouvertes.
Si vous avez une voiture qui roule au gaz, pas de problème : les stations Propane sont nombreuses et ouvertes.
Nous trouvons une station avec diesel dispo, sans file d’attente gigantesque et nous en profitons pour faire du change : les devises étrangères sont très recherchées donc le taux est bien plus intéressant dans les stations, boutiques qu'au bureau de change ou à la banque.

Tashkent. Ses policiers, ses policiers, ses policiers. Mais chacun est aimable quand  nous semblons chercher.

place de l'Indépendance avec ses pélicans

Là également, ville à la fois très moderne -ici sans ostentation- où subsistent ses petites maisons de

dans la même rue
briques crues cachées derrière leurs murs, remplacées au fur et à mesure par des maisons plus cossues..
 


 

mercredi 23: visite à l’ambassade du Turkménistan pour solliciter notre visa. RAS, ouf!
résultats des épreuves le 1er octobre.
Pas d'avertisseurs (ou très peu et faibles) mais les coups de sifflets de la police rappellent qu'il ne faut pas s'asseoir par terre, pas marcher hors des sentiers battus.
Nous continuons à faire du change "au black" dans une voiture où le conducteur va chercher les paquets de billets dans son coffre.
A la petite épicerie du coin, on voit les gens qui sortent une énorme liasse de billets et qui comptent, longtemps! on se croirait dans un film de gangsters. Pas de porte-monnaie: chacun range les billets entourés d'un élastique dans un sac plastique.



une liasse de 100 billets de 1000s = 20€
Comme ordre d'idée : le pain coûte 800 soms (20 centimes €)

Après la quête du diesel, maintenant, le parcours du combattant pour acheter une carte SIM:
Depuis hier nous voulions téléphoner à Rustam cousin d'Ayna qui habite Tashkent, donc carte SIM nécessaire. Aucun vendeur ne pouvait nous en vendre.??? Trouvant quelqu'un qui parle suffisamment l'anglais dans un hôtel, nous découvrons qu'il faut présenter un justificatif de résidence + passeport pour cela.
Nous avons passé 1 heure dans une agence d'opérateur téléphonique (dossier) puis nous avons pu contacter Rustam que nous verrons le 1er octobre. Dès notre 1er contact il nous a conseillé en riant d'être très patients. Ah, bon ? OK.
 
Mercredi 23 demande de visa turkmène faite. Nous devrons attendre le 1er octobre pour connaître la décision. D’ici là : nous repartons vers la vallée de Fergana en prenant cette fois notre temps.

Tashkent nous semble plus nuancé dans son essor :  des quartiers sont rénovés, les immeubles ou de grosses maisons "bourgeoises" remplacent les petites maisons en terre avec jardin et poules, des magasins opulents s’ouvrent mais cela parait moins contrasté qu’à Bishkek. Pas de Toyota Lexus … mais plutôt des voitures moyennes. Des mini-vans Daewoo sillonnent la ville : maniables, ils servent à tout : livraison, taxis. Par leurs fenêtres ouvertes, on entend de la musique (c’est nouveau et ça reprend la question à 1000 pastèques posée au Tadjikistan  et au Kirghiztan où on n’entendait aucune musique dans les voitures, les magasins ou s’échappant d’une maison. )

….
Vallée de Fergana quelques jour plus tard.


mosquée à Kokond
 
 une forêt de colonnes en bois sculpté
 
 



Fergana: région conservatrice où les femmes doivent être habillées pudiquement...pas les chaises!



 
le palais  XIXe qui reflète mal l'importance de cette ville capitale régionale au 18e et 19e siècle

Nous reprenons le fil du récit. Tout d’abord, une belle nouvelle grâce à Internet qui ne nous coupe pas de nos proches : nous avons gagné un nouveau petit-fils, bonheur de savoir que tout c’est bien passé et nous pouvons même l’admirer.

Mais ce soir 29 septembre, nous avons gagné  le chien le plus crétin du pays : Rantanplanov.

On s’installait dans notre joli bivouac découvert à l’aller entre la vallée de Fergana et Tashkent  et – comme d’habitude-  quelqu’un super accueillant arrive et nous invite chez lui le lendemain ; ce qui change, c’est qu’il a un chien, qui nous fait la fête et qui décide de nous adopter. On lui présente notre menu : tomates et herbes, il reste quand même.

A  chaque personne, mouton ou moustique qui passe même loin (souvenez-vous : la nature n’est jamais déserte), il aboie et grogne pour nous protéger. La chance !…

Ce ne sont sans doute pas ses aboiements qui ont alerté le « service d’ordre » qui arrive dans l’obscurité : 4 paramilitaires ?? avec 1 grosse arme  descendent d’ un camion et d’une voiture sortent 2 civils. Pour faire taire Rantanplanov qui ne les apprécie pas du tout, un gros costaud en treillis prend une belle pierre,  on le fusille du regard avec un « niet ». Ouf, il arrête son geste.

Pour eux,  « bonjour » se dit « passeport ». Nous refusons bien sûr de leur donner, nous leur montrons à travers la vitre (portes verrouillées) et nous  leur demandons  tout aussi aimablement que leur bonjour « vous êtes qui ? » …et notre interlocuteur de  répondre « Sergueï ». Moment  délicieux où il ne faut surtout pas éclater de rire.
Ca finira quand même avec un retour plus tôt que prévu à Tashkent dans la nuit. Grrr


 
Une soirée précédente  a également été spéciale : loin après un village toujours dans la vallée de Fergana, nous nous installons pour la nuit. Toute petite ballade avec Defender toujours visible et à notre retour, la trousse de toilette  de Denise accrochée dehors a disparu. Seules les lectrices pourront comprendre et être solidaires de son  désespoir. (Heureusement, elle avait encore quelques pots et autres tubes bien au frais dans le petit réfrigérateur, ce qui fait d’ailleurs qu’on ne peut y ajouter que les 2 tomates du dîner)  Début de soirée un peu morose.

Avant de nous coucher, nous sortons... ; et un monsieur surgit hors de la nuit. « Pas question de dormir ici », il insiste aimablement, on joue l’incompréhension alors il va au village et revient avec une dame souriante armée de son dico ouzbèque/russe/anglais. Il veut nous conduire à sa ferme.

Nous débarquerons  la nuit chez  une famille chaleureuse : un jeune couple avec 3 enfants, les 2 grands-parents ;  la jeune femme super qui mène rondement les choses a préparé une collation, elle nous arrange nos lits « princesse aux p’tits pois ». Le lendemain, visite de leur petite ferme  jolie et parfaitement entretenue; nous repartons les bras chargés de bonnes choses.

Plein de contrastes décidément.


la famille qui nous a accueillis si gentiment, chacun à leur façon



Tashkent, 30 septembre : nous ne vous ferons pas admirer le métro de Tashkent : il faudra nous croire sur parole quand on vous dit qu’il est majestueux. Nous avons vu 5 stations : toutes différentes, évoquant à chaque fois l’identité du pays (périodes glorieuses de l’histoire, les arts,  les cosmonautes célèbres...), beaucoup de céramique, marbre ouzbèque, verre dépoli.
Trois policiers dans la 1e station nous tombent dessus, ils  sont contents qu’on admire leur métro, mais « désolés, interdiction de photographier ». Ils vérifient même que nous effacions les photos déjà prises. Dommage pour vous.

Jeudi 1er : le couperet est tombé : pas de Turkménistan, donc pas d’Iran.

Le service des visas turkmène nous balade et la date d'expiration de notre visa ouzbèque avance : si nous voulons voir les grandes villes ouzbèques de la Route de la Soie, nous ne pouvons pas attendre jusqu’au 5  « mais peut-être plutôt le 12 » ou faire des aller-retour de plusieurs centaines de km.

Changement d'itinéraire donc, après notre séjour en Ouzbékistan, direction le SW du Kazakhstan vers le Manguistaou où nous retrouverons le désert, des canyons, avec les nécropoles anciennes des bergers en transhumance (lisez « les Cavaliers » de Kessel)et mosquées souterraines, puis la Géorgie en coupant par Astrakan en Russie.

Visa russe vite fait bien fait : on l’aura le 6 : bravo Poutine (!). En l’attendant nous allons essayer  l’aller-retour à Samarcande – avec juste une photocopie de notre passeport…Nous aimons bien les sports extrêmes.

 

 

 
 

 

4 commentaires:

Didier et Nicole a dit…

Que de péripéties !!! C'est trop pour moi, j'aurai peur de rester coincé sur place, je péfère un séjour en Aveyron comme celui que nous venons de faire avec plaisir. C'est plus calme et joli quand même.
J'ai l'impression que le fait de porter un uniforme est le "must" dans ces pays.
Bon courage pour la suite.

Anonyme a dit…

Combien de lois dans ce pays pour interdire le camping sauvage ?!!! Bravo pour la patience et le sang-froid dont il faut faire preuve... Bises. Patrice

Unknown a dit…

L'Ouzbékistan semble être un pays de contradictions... Des superbes colonnes en bois sculptées mais une place de l'indépendance en marbre... Des policiers frileux, mais des habitants qui semblent chaleureux (voire un peu trop...). Par contre, quel dommage que le Turkmenistan et l'Iran soit bannis du programmes, nous imaginons qu'ils devaient représenter une part importante du fabuleux voyage.
Ici aussi un beau voyage commence pour nous, Timoé est parmi nous depuis 3 semaines, et nous commençons à trouver chacun nos marques. Bisous bisous de nous 4. Content que vous ayiez enfin pu voir les photos du nouveau petit fils. Guillaume

Unknown a dit…

P.S.: Pas très gentil de se moquer de Rantanplanov... Je me souviens d'un autre Cachou, très proche de ce rantanplan mais qui pourtant était si sympa ! Crétin... Mais sympa ! :D

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